Paresse, dépendance, malhonnêteté… Les personnes assistées sociales sont victimes de préjugés. En plus d’en souffrir, elles subissent des obstacles à l’accès au logement, aux loisirs et à l’emploi. Largement répandu, le portrait stéréotypé des personnes assistées sociales persiste au sein de la population. Elles sont ainsi enfermées dans une image erronée qui exclut leurs véritables expériences et conditions de vie.
La couverture médiatique de l’assistance sociale soutient peu les personnes assistées sociales et les groupes communautaires qui défendent leurs droits : elle demeure faible et dominée par la méconnaissance et le point de vue des responsables politiques.
Témoignages préjugés
« "Tu devrais travailler, [faire] ci, ça, ça… " ou "pourquoi tu restes assise sur ton divan à rien faire?" Arrêtez de juger, vous ne le savez pas pourquoi je suis sur le bien-être social. Informez-vous donc à la place, avant de juger le monde. »
« Les préjugés ont commencé tout de suite. Quand tu es sur l’aide sociale : "tu es paresseux; tu ne veux pas travailler; tu prends un coup au début de chaque mois; tu bois ton chèque (…); tu n’es pas propre; tu n’es pas intelligent". »
« "Les ostis de BS… sont fatigants, sont dans nos jambes là. Y’en demandent trop… qui aillent travailler… lève-toi pis va… donne-toi un coup de pied dans le cul pis va travailler." Hey… Ça se peut tu dire des affaires de même? »
« [L’assistance sociale], c’est considéré comme un vol d’argent. Parce qu’ils paient les impôts […] C’est ça ce qu’ils disent. Mais, même s’ils le disent pas, ils te regardent et tu le comprends. »
Dans la boîte à préjugés
Selon un sondage réalisé en 2015, près de 50 % de la population québécoise entretient une opinion négative à l’égard des personnes assistées sociales. La condition sociale serait le premier motif de discrimination, devant la religion, l’appartenance culturelle ou l’orientation sexuelle.
Nos travaux ont confirmé la persistance de cette opinion négative.
Entrez dans la boîte à préjugés et découvrez-en plus. Attention! Les préjugés sont durs. Vous êtes libre de passer votre chemin…
Le poids des perceptions
Nous avons demandé aux personnes assistées sociales par quels mots les Québécois et Québécoises les qualifient :
Vie facile, bons à rien, bougons, boulets, B.S., alcooliques, toxicomanes, aux crochets de la société, crosseurs, débiles, emmerdeurs, exclus de la société, fraudeurs, hypothéqués, itinérants, lâches, paresseux, maillon faible, mal nantis, niaiseux, nombrils du monde, parasites, pas de jugement, personnes à charge avec des problèmes de santé mentale, pourris, profiteurs, tout croches
Le thermomètre de l’opinion publique
L’opinion favorable des personnes répondantes, évaluée sur une échelle de 0 à 100, est notée ainsi envers ces groupes :
- 34 pour Québec Solidaire
- 37 pour le Parti libéral du Québec
- 39 pour le Parti québécois
- 45 pour les politiciennes et politiciens en général
- 45 pour les gens sur le bien-être social (les « BS »)
- 51 pour les personnes assistées sociales
- 54 pour Coalition avenir Québec
- 57 pour les féministes
- 61 pour les personnes immigrantes
- 65 pour les gens sur l’assurance-emploi
- 72 pour les gais et lesbiennes
- 77 pour les Canadiens et Canadiennes
- 79 pour les Québécois et Québécoises
Les manières de nommer les groupes sociaux influencent l’opinion des gens. En exemple : 45 % des gens affirment avoir une opinion favorable envers les « BS », contre 51 % envers les « personnes assistées sociales ».
Perception des postes de dépenses gouvernementales
En comparaison, la part du budget accordée à l’éducation est légèrement surévaluée à 29 %, tandis qu’elle est réellement de 24 %, et celle accordée à la santé est sous-évaluée à 39 %, alors qu’elle représente en fait 46 % du budget annuel.
Les Québécois et Québécoises surestiment les coûts des programmes d’assistance sociale. Ils croient que 21 % du budget annuel du gouvernement du Québec y est consacré, alors que le coût réel des prestations versées est de 2 à 3 %.
Accorder moins ou plus de budget à l’assistance sociale?
Nous avons sondé l’opinion publique pour savoir si le gouvernement devrait accorder moins, autant ou plus d’argent à la santé, à l’éducation et à l’assistance sociale.
Même lorsqu’on informe les personnes du coût réel de l’assistance sociale, 55 % ne désirent pas augmenter les budgets gouvernementaux qui y sont consacrés.
Plus précisément, 17,2 % estimaient que le montant alloué à l’assistance sociale devrait diminuer, comparativement à 6,4 % pour l’éducation et 12,3 % pour la santé.
C’est 37,7 % qui croient pour leur part que ce montant devrait rester le même pour l’assistance sociale; 28 % pensent qu’il devrait en être de même pour l’éducation et 36,6 % pour la santé.
Si 45 % jugent que la part du budget provincial attribuée à l’assistance sociale devrait augmenter, 65,6 % sont du même avis en ce qui concerne l’éducation, et 51 % en ce qui a trait à la santé.
Peu de générosité à l’égard des personnes assistées sociales
Nous avons demandé aux Québécois et Québécoises de déterminer le revenu mensuel minimal pour couvrir les besoins de base. Ceux-ci estiment qu’une personne seule doit disposer de 1843 $ mensuellement. Ce montant passe à 3400 $ pour une famille de 4 personnes.
Or, les répondants et répondantes n’accordent en moyenne que 644 $ mensuellement à une personne assistée sociale considérée apte à l’emploi. Ils consentent à verser 1265 $ à une famille de 4 dont les parents sont considérés comme aptes à l’emploi.
Les personnes répondantes se montrent toutefois un peu plus généreuses envers les personnes considérées inaptes à l’emploi. Elles allouent en moyenne 1451 $ à une personne seule et 2476 $ à une famille de 4.
Dans tous les cas, l’aide financière accordée aux personnes assistées sociales se situe en moyenne en dessous de ce que les personnes répondantes jugent être le montant minimal requis pour subvenir aux besoins de base.